Le pays a célébré vendredi le 35ème anniversaire de sa réunfication. Un tiers de siècle plus tard, d'énormes progrès ont été réalisés mais des frustrations persistent à l'Est ainsi que des différences entre les deux parties de l'Allemagne.
Comme chaque année, les festivités de la fête nationale allemande se déroulent dans une région différente, celle qui préside pour 12 mois le Bundesrat, la chambre haute qui représente les seize Länder. Cette année, c’est Sarrebruck qui menait la danse. La capitale de la Sarre, à la frontière avec la France, a organisé durant trois jours une grande fête populaire. Le 3 octobre, le jour de la fête nationale allemande qui marque l’entrée en vigueur en 1990 du traité d’unification entre la RFA et la RDA, une cérémonie officielle réunissait les dirigeants du pays.
Les cérémonies du 3 octobre avec le discours d’Emmanuel Macron en partie en allemand
”L’avenir passe par le changement” : le slogan des cérémonies de vendredi
Le président de la république Frank-Walter Steinmeier, le chancelier Friedrich Merz et de nombreux autres personnalités étaient à Sarrebruck vendredi. La ministre-présidente de la Sarre, la sociale-démocrate Anke Rehlinger, par ailleurs plénipotentiaire pour les relations culturelles franco-allemandes, avait profité de sa participation au conseil des ministres franco-allemand à Toulon fin août pour inviter Emmanuel Macron. C’était la première fois depuis l’an 2000 avec Jacques Chirac lors du dixième anniversaire de la réunification qu’un président français assistait à cette cérémonie.
Emmanuel Macron durant son discours à Sarrebruck (photo Staatskanzlei Saarland)
Face aux menaces qui pèsent sur le continent, Friedrich Merz et Emmanuel Macron ont plaidé pour un sursaut des Européens comparable à celui qui a marqué l’histoire après la chute du mur de Berlin et la réunification allemande. Le chancelier a évoqué les divisions qui subsistent entre les deux parties de son pays, mais aussi la polarisation de la société allemande qui augmente : « Ne nous laissons pas paralyser par la peur. Osons un nouveau départ. Rappelons-nous avec quelle confiance nos concitoyens est-allemands ont osé le faire il y a 35 ans. » Le chancelier a livré un plaidoyer européen auquel a répondu Emmanuel Macron. Face aux menaces actuelles, le président français se refuse à l'abandonner notre contienent aux complotistes, au bruit et à la fureur : « Nous consoliderons notre unité si nous avons l'audace et la détermination de celles et ceux qui, il y a 35 ans, ont abattu des murs. Et ce qu'il nous faut penser pour le siècle qui vient, c'est une Europe de puissance. »
”Grandir ensemble” : la une du quotidien avec des morceaux de pansements pour rapprocher les deux parties de l’Allemagne
Friedrich Merz a reconnu dans son discours que si l’unité politique existait depuis 35 ans et que le rapprochement économique et social des deux parties du pays avait fait d’énormes progrès, des divergences voire des divisions subsistent entre Ossis (à l’Est) et Wessis (à l’Ouest).
Six Allemands sur dix estiment qu’aujourd’hui encore les différences entre l’Est et l’Ouest l’emportent sur les points communs. Un tiers est d’un avis contraire. Cet écart qui peut surprendre augmente même depuis quelques années. Les Allemands de l’Est, les premiers concernés, sont encore plus négatifs : les trois quarts d’entre eux estiment que 35 ans après la réunification les différences avec l’Ouest l’emportent. Ils sont autant dans l’ex-RDA à se considérer comme des citoyens de seconde zone.
Comment expliquer ces chiffres alors qu’une immense majorité approuve la réunification et que beaucoup reconnaissent que leur situation personnelle s’est améliorée ? Des différences matérielles et économiques expliquent ce sentiment. Les salaires à l’Est restent en moyenne 17% plus bas qu’à l’Ouest mais le fossé s’est sensiblement réduit. Les patrimoines sont aussi beaucoup plus importants à l’Ouest où les familles ont pu accumuler plus de richesses durant les dernières décennies. Le retard pour le niveau des retraites a lui été comblé.
Mais le sentiment de ne pas être toujours considérés comme des citoyens à part entière de l’Allemagne réunifiée est aussi lié à des facteurs moins matériels. Le manque de représentativité au sein des élites (chefs d’entreprises, présidences d’universités, tribunaux, médias etc…) donne à beaucoup l’impression que les Allemands de l’Ouest continuent de donner le la. Si beaucoup de « Ossis » se sont précipités depuis longtemps pour découvrir la partie occidentale de leur pays, la curiosité reste dans l’autre sens souvent modeste. Judith Enders, membre du groupe « Troisième Génération Est », se rappelle de deux anecdotes parlantes : « Quand je suis arrivée à l’école à l’Ouest après la réunification, personne ne s’est intéressé à mon passé d’Est-Allemande, pourtant tellement différent ; quelques années plus tard, dans un bar à New York, mon voisin trouvait ça formidable et a tout voulu savoir sur ma jeunesse à l’Est ». Les unes des quotidiens allemands à l’occasion du 35ème anniversaire de la réunification traduisent ce déséquilibre : ce jubilé est mis en avant par la plupart des journaux dans l’Est du pays ; la plupart des médias à l’Ouest l’ignorent.
Cette photo prise à Sarrebruck vendredi illustrait à merveille le sentiment des ex-Allemands de l’Est de ne pas être suffisamment représentés au sein des élites du pays. On voit sur le cliché (Staatskanzlei Saarland) de gauche à droite la ministre-présidente de la Sarre Anke Rehlinger, la présidente du Bundestag Julia Klöckner, le président Steinmeier, le chancelier Merz et le président de la cour constitutionnelle (et les partenaires respectifs). Toutes ces personnes sont originaires de l’Ouest. Bien sûr, les cérémonies de la réunification ont régulièrement lieu dans une région de l’ex-RDA avec un ministre-président qui en est originaire. Une Allemande de l’Est Angela Merkel a dirigé durant seize ans le pays et le prédécesseur de Steinmeier, Joachim Gauck, était un pasteur de l’ex-RDA. Il n’empêche : cette photo détonait quelque peu.
Le sentiment de certains Est-Allemands d’être insuffisamment représentés est exploité par l’extrême-droite qui bat des records dans la partie Est du pays. Le parti AfD (Alternative pour l’Allemagne) y est crédité dans les sondages de près de 40% des intentions de vote dans certaines régions. Des élections régionales auront lieu l’an prochain dans deux d’entre elles et déjà la crainte sinon d’une accession au pouvoir à tout le moins d’un blocage en raison d’une extrême-droite dominante agite les esprits. En Saxe-Anhalt, le patron sortant de la région, le chrétien-démocrate Rainer Haseloff qui ne se représente pas a déjà menacé de quitter le Land si l’AfD devait arriver au pouvoir.
Le parti utilise les références historiques et culturelles pour mettre en avant une identité Est dont il serait le défenseur principal. L’AfD n’hésite pas à récupérer des slogans de la révolution pacifique de l’automne 1989 comme « nous sommes le peuple » scandé par les Est-Allemands descendus à l’époque dans la rue pour dénoncer la dictature communiste. En clair, l’AfD veut faire croire que l’Allemagne d’aujourd’hui ne vaut pas mieux que la RDA d’autrefois.
De multiples facteurs expliquent ce succès de l’extrême-droite à l’Est : l’absence d’un profond travail d’éducation politique après la chute du mur qui succédait dans cette partie de l’Allemagne à deux dictatures, nazie et communiste; une société civile et des corps intermédiaires (partis, associations, ONG, Eglises, syndicats) plus faibles qu’à l’Ouest mais aussi dans des zones rurales aux infrastructures déficientes et où la population a fortement régressé le sentiment d’être abandonnés par les responsables politiques. La partie Est de l’Allemagne a été marquée en 35 ans par un important recul démographique. La population du pays a augmenté de 5% en 35 ans ; elle a reculé de 26% en Saxe-Anhalt et de 20% en Thuringe. Les plus jeunes, les mieux formés, les plus mobiles sont souvent partis.
« Il y a dans une partie de la société est-allemande une véritable haine de l’Ouest » explique l’historien Ilko-Sascha Kowalczuk, spécialiste de la RDA et de l’Est de l’Allemagne. Cet esprit critique, né à Berlin-Est, rejette les « jérémiades » régulières de ses concitoyens et un rôle de victime qui lui parait déplacé. « La réunification, c’est une success story. Si les paysages florissants promis prématurément par le chancelier Kohl -au pouvoir lors de l’unité allemande- ont mis du temps à émerger, ils sont là aujourd’hui. Les Est-Allemands, plutôt que de se comparer en permanence aux Munichois ou aux Hambourgeois, devraient plutôt se rappeler d’où ils viennent et se comparer à leurs voisins plus à l’Est de l’Allemagne pour qui l’évolution a été beaucoup plus lente ».
”tout était mieux avant !” “Partons alors en week-end en Trabant” “ça n’est pas ce que je voulais dire”
Car la focalisation permanente sur les différences Est-Ouest fait oublier que l’Allemagne est un pays fédéral avec de fortes identités et des différences économiques régionales. Des grandes villes et des zones industrielles à l’Est ont un niveau de revenus comparable voire supérieur à des régions occidentales du pays. Un déplacement dans le bassin de la Ruhr, ancienne zone industrielle florissante confrontée aujourd’hui à de graves problèmes économiques et sociaux avec des infrastructures vieillissantes tranchant avec les villes proprettes de l’Est montre que la situation est plus complexe.
Mais au-delà des différences réelles ou ressenties, il y a une identité qui subsiste, un « Oststolz » -une fierté de l’Est- qui se développe. Avec des accents xénophobes et radicaux à l’extrême-droite mais aussi sous une forme plus positive comme l’illustre le livre de l’influenceur est-allemand de 31 ans Alexander Prinz. « Je suis fier de ce que les Allemands de l’Est ont réussi depuis la réunification. Je crois qu’ici, nous avons toutes les raisons d’être fiers. Notre génération a besoin de cela pour reprendre le flambeau de nos parents » explique l’auteur du livre « Oststolz » sorti le mois dernier. Il y met en valeur les expériences accumulées, parfois dans la douleur, par les Est-Allemands, confrontés après la réunification à une transformation radicale qui a touché toutes les familles avec chômage, reconversions, déménagements et crises personnelles. Ces expériences du passé confèrent d’un côté un atout aux Allemands de l’Est dans un pays où à nouveau des changements massifs figurent à l’ordre du jour. Mais pour beaucoup, la peur de revivre les traumatismes de l’après-réunification ou de voire la situation qu’ils se sont depuis construite l’emportent.
Je vous renvoie aussi à l’excellent grand reportage de ma collègue Nathalie Versieux sur les traces de la RDA aujourd’hui dans l’Allemagne réunifiée : https://www.rfi.fr/fr/podcasts/grand-reportage/20250930-r%C3%A9unification-allemande-35-ans-plus-tard-que-reste-t-il-de-la-rda
“Nous ne sommes pas en guerre mais pas en paix non plus” : la formule de Friedrich Merz il y a quelques jours résume la situation actuelle. Le chancelier l’a rappelé dans son discours à Sarrebruck vendredi, l’Allemagne comme d’autres pays doit affronter aujourd’hui une double menace extérieure et intérieure. Le sujet s’est imposé lors du sommet européen informel de Copenhague après des incursions suspectes de drones dans différents pays européens. En Allemagne, la fermeture momentanée à deux reprises de l’aéroport de Munich ces derniers jours suite au survol d’objets volants suspects a fait monter la tension d’un cran. Berlin dénonce la main de Moscou derrière toute ou partie de ces opérations et veut réagir en donnant des compétences supplémentaires à la Bundeswehr pour intercepter et/ou détruire des drones suspects. La police aujourd’hui compétente n’a pas les moyens techniques nécessaires. L’armée, elle, n’a pas le droit d’agir pour des raisons constitutionnelles limitant son intervention en Allemagne même à des cas exceptionnels. Après les dérives du régime nazi, une telle option reste limitée pour éviter des dérapages non démocratiques.
Un drone s’écrase contre le mur invisible entre les deux Allemagnes. Sur le panneau, on peut lire “C’est ici que se dressait le mur de Berlin”
Le ministre de la Défense a appelé au calme ce dimanche :"Bien sûr, je comprends l'insécurité", a déclaré Boris Pistorius dans une interview où il déclare "nous devons nous préparer au pire". Mais jusqu'à présent, les drones observés "n'ont pas constitué une menace concrète", souligne-t-il. Le ministre a réclamé davantage de compétences pour la police régionale et les infrastructures critiques pour lutter contre ce type d'incident. "Nous avons les moyens de réagir, [...] même si nous n'avons pas encore toutes les capacités que nous souhaiterions pour les combattre".
Le projet franco-allemand de Système de Combat Européen du Futur (SCAF) lancé en 2017 par Emmanuel Macron et Angela Merkel (auquel l’Espagne s’est depuis associé) verra t’il finalement le jour ou bien ce symbole de la souveraineté européenne va t’il être sacrifié sur l’autel des égoïsmes nationaux et industriels ? L’objectif est de remplacer les avions Rafale et Eurofighter par un aéronef de sixième génération. La coopération militaire franco-allemande n’a jamais été une partie de plaisir et la naissance de cet énorme projet industriel s’avère depuis le début laborieuse.
L’arrivée de Friedrich Merz au pouvoir au printemps avait laissé espérer la relance du projet mais quelques mois après, son avenir parait plus indécis que jamais. Le chancelier a récemment déclaré “La situation actuelle n’est pas satisfaisante”. Une solution promise pour le conseil des ministres franco-allemand fin août à Toulon n’a pas été présentée. Le partenaire industriel côté français, Dassault Aviation, souhaiterait avoir le leadership sur le projet à côté d’Airbus. La société française qui a construite seule l’actuel Rafale estime pouvoir le cas échéant construire un nouvel avion sans partenaires. Dassault a des craintes concernant les lourdeurs administratives allemandes et le poids du Bundestag dans les décisions militaires. A Berlin, on s’irrite du positionnement de l’entreprise française. A cela s’ajoute des différences sur le produit à livrer : la France souhaite un avion plus petit qui puisse être utilisé sur des porte-avions ce qui n’est pas le cas de l’Allemagne.
Les prochaines semaines seront décisives car la phase 2 doit débuter en 2026 avec la construction d’un démonstrateur pour cinq milliards d’Euros. Si le projet avorte, il y aura en premier lieu des conséquences d'abord financières. Le Scaf est un projet de 100 milliards d'euros sur 20 ans financé par trois pays, l’Allemagne, l’Espagne et la France avec une répartition de 33% chacun. La France, au regard de ses finances publiques, peut-elle financer seule un tel programme ? La question se pose.
-le train de nuit c’est fini
C’était la foule des grands soirs le 11 décembre 2023 sur un quai de la gare centrale de Berlin. Quatre PDG de compagnies ferroviaires européennes dont la SNCF et la Deutsche Bahn étaient présents aux côtés des ministres des Transports allemand et français. Tout ce beau monde et les journalistes se réchauffaient à coup de vin chaud pour célébrer le départ après neuf ans d’interruption d’une liaison de nuit entre Paris et Berlin. Cette ligne comme d’autres était opérée par l’Autrichien ÖBB. Côté français, une subvention permettait d’assurer la rentabilité du projet. Le ministre des Transports de l’époque, Clément Beaune, déclarait avant de monter à bord : “Ça mérite un investissement et un soutien ». Son homologue allemand résumait le symbole par une image gastronomique : “manger une dernière saucisse au curry avant le départ à Berlin avant de savourer des croissants frais à l’arrivée à Berlin.”
Au début de la semaine dernière, la compagnie autrichienne ÖBB et ses partenaires – la SNCF et la Deutsche Bahn – ont annoncé la fin des trains de nuit entre Paris et Berlin en raison de la suppression de la subvention de l’État français, comprise entre 5 et 10 millions d’euros par an. Sans ce soutien, le déficit est trop lourd à absorber pour les opérateurs. Certes, la demande était au rendez-vous avec 66 000 passagers en 2024 et un taux de remplissage de 70%, jugé très correct. Mais les coûts restent trop élevés. Un train de nuit par définition ne peut circuler qu’une fois par jour; il lui faut plus de personnel; la liaison n’était pas quotidienne comme cela avait été prévu. Et le prix des billets avait du mal à rivaliser avec l’avion.
En France comme en Allemagne, des responsables politiques ont dénoncé cette mesure. Une pétition a été lancée https://ouiautraindenuit.wordpress.com/petition-sauvons-les-trains-de-nuit-paris-berlin-et-paris-vienne-2/ Une manifestation a eu lieu devant la gare de l’Est :
-suppressions d’emplois :
Les difficultés économiques de l’Allemagne se traduisent depuis des mois par des annonces de suppressions de postes même si le chômage reste stable. La semaine dernière, le premier équimentier automobile Bosch annonçait la disparition de 13 000 postes supplémentaires d’ici 2030 en Allemagne où ses capacités sont sous-exploitées par rapport à la concurrence chinoise. Des mesures d’économies similaires ont été prises par d’autres équipementiers comme Continental et Schaeffler. Les constructeurs automobiles comme Volkswagen réduisent également leurs effectifs. Depuis 2019, 250 000 emplois industriels ont disparu en Allemagne.
La grue, le symbole de Lufthansa, perd ses plumes après l’annonce de 4000 suppressions de postes
La semaine dernière également, c’est la première compagnie aérienne européenne, Lufthansa, qui annonçait vouloir supprimer 4000 postes d’ici 2030. Il s’agit d’abord d’emplois administratifs, tous basés en Allemagne, qui seront remplacés par l'emploi des nouvelles technologies. Ces postes représentent 20% des effectifs de la compagne aérienne qui emploie au total 100 000 personnes. Lufthansa a assisté à une baisse de rentabilité suite au Covid-19 et peine actuellement à stabiliser ses finances.
-la CDU et la défense des moteurs thermiques
Le mouvement “Dernière génération” a beaucoup fait parler de lui en Allemagne avec des blocages de la voirie, les manifestants se collant à l’asphalte pour protester contre les émissions de CO2 et une défense insuffisante de l’environnement.
Verra-t’on bientôt comme dans la caricature ci-dessous le chancelier Merz (à gauche) et le patron de la CSU bavaroise Markus Söder recourir à de telles actions spectaculaires pour protester contre la fin des moteurs thermiques en 2035 et réclamer un sursis supplémentaire pour ces véhicules ? On peut en douter. Mais la petite musique qui montait au sein de l’industrie automobile allemande au profit d’un assouplissement obtient de plus en plus le soutien des chrétiens-démocrates que les réductions d’emplois évoquées ci-dessus alertent. La décarbonation de l’économie pourrait-elle renforcer la désindustrialisation de l’Allemagne ? Friedrich Merz a récemment fait une sortie en faveur d’une plus grande flexibilité dans l’application des délais pour la fin des moteurs thermiques au sein de l’Union européenne.
Un sommet autour du chancelier et de l’industrie automobile jeudi prochain ne manquera pas d’évoquer cette question. Mais le dossier divise la coalition au pouvoir à Berlin. Les sociaux-démocrates rejettent un assouplissement des mesures actuelles estimant qu’elles sont nécessaires et qu’un changement remettrait la capacité des industriels à planifier sur le long terme.
-des gangs criminels qui abusent de l’Etat social allemand ?
Différentes réformes sont à l’ordre du jour en Allemagne dont celle de l’aide sociale (“Bürgergeld”). Une polémique monte sur les abus auxquels conduirait la libre circulation des personnes au sein de l’Union européenne. Tout citoyen peut s’installer et vivre dans un autre pays et bénéficier des prestations sociales à condition de travailler. Mais les règles ne précisent pas ce que cela signifie concrètement. Dans le bassin de la Ruhr notamment, des Bulgares et des Roumains s’installent, décrochent un mini job qui leur permet d’obtenir l’aide sociale en plus de leur modeste rémunération (563 Euros par mois et par adulte) pour eux et pour leurs enfants. Le loyer est pris en charge. Une criminalité organisée conduit des personnes à loger dans des habitats insalubres. Le propriétaire est parfois celui qui fournit le mini job. Le maire social-démocrate de Duisbourg qui vient d’être réélu haut la main dénonce depuis longtemps ces abus contre la ligne de son parti qui craint de faire le jeu de l’extrême-droite en mettant un tel thème en avant. Mais par cette retenue, le parti de gauche longtemps dominant dans la Ruhr s’aliène son électorat traditionnel, des travailleurs qui ne comprennent pas de tels abus et ont contribué lors des récentes élections municipales au succès du parti d’extrême-droite AfD.
Alerte aux drones aux municipales en Rhénanie du Nord Westphalie
-vers une réforme de la taxation des successions ?
Les entreprises allemandes bénéficient d’un régime fiscal très favorable conçu pour protéger le “Mittelstand”, ces fameuses PME pilier du made in Germany et dans les rangs desquels on trouve de nombreux “hidden champions”. La loi permet aux héritiers d’actifs de production ou de parts de société de bénéficier d’une exonération partielle (85%) ou totale de l’impôt sur les successions. A condition que l’activité de l’entreprise concernée soit poursuivie. Cette mesure fiscale contribue au développement de patrimoines impressionnants et explique un développement des inégalités dans le pays. De façon inattendue, le président du groupe parlementaire chrétien-démocrate au Bundestag, Jens Spahn, peu suspect de gauchisme redistributif, a reconnu récemment qu’une correction était nécessaire provoquant un débat dans son propre camp politique. Les sociaux-démocrates, partenaires de la CDU au gouvernement, ont immédiatement applaudi. Le SPD plaide depuis longtemps pour une réforme (et pour la réintroduction de l’impôt sur la fortune).
C’est un procès politiquement sensible qui s’est achevé mardi dernier pour le parti d’extrême-droite allemand. L’ex-collaborateur d’un député du mouvement a été condamné à quatre ans et neuf mois de prison ferme pour espionnage au profit de la Chine. Son ancien employeur est au centre d’une enquête judiciaire.
Jian Guo, un Allemand d’origine chinoise a transmis d’après la justice allemande plus de 500 documents du parlement européen, dont certains classés comme particulièrement sensibles à Pékin. L’homme a été entre 2019 et 2024 assistant parlementaire de Maximilian Krah, une personnalité sulfureuse de l’AfD. Jian Guo était aussi accusé d’avoir livré des informations sur des responsables du parti d’extrême-droite allemand. Sa complice qui travaillait pour une entreprise de logistique a été condamnée à un an et neuf mois avec sursis. Elle avait fourni des informations sur les cargaisons de vols au départ de l’aéroport de Leipzig/Halle en Saxe. D’après l’hebdomadaire « Der Spiegel », il s’agissait de matériel militaire de l’entreprise Rheinmetall.
Maximilian Krah, l’ex-employeur de Jian Guo qui affirme avoir appris par la presse l’affaire a réagi sur la plateforme X : „Il est central pour moi que la vérité soit faite sur cette affaire dont j’ai été la victime ». Mais le responsable de l’AfD aujourd’hui député au Bundestag a vu récemment son immunité parlementaire levée. Il fait lui-même l’objet d’une enquête pour corruption et blanchiment d’argent en lien avec la Chine.
Cette affaire, comme d’autres, n’impressionne pas les électeurs de l’AfD dont les scores dans les sondages atteignent des sommets. Cette semaine, cette étude d’opinion donnait même trois points d’avance au parti extrémiste par rapport aux chrétiens-démocrates.
Une première au parlement allemand a eu lieu fin septembre. La députée écologiste Hanna Steinmüller qui devait prendre la parole lors des débats n’a pas confié son bébé à une autre personne le temps de son discours mais s’est dirigée avec ce dernier sur la poitrine vers la tribune du Bundestag. Elle affirme ne pas avoir prévu cette première. Déranger son enfant qui dormait l’aurait sans doute réveillé.
”Concilier politique et sommeil profond”
Cette première a suscité de nombreux débats. Certains ont dénoncé une mise en scène et une instrumentalisation du bébé. Plus sérieusement, ce débat a une fois de plus souligner la difficulté en Allemagne de concilier vie professionnelle et maternité, surtout pour les femmes qui ont des enfants en bas âge. Certes, une députée ou une ministre a les moyens de s’arrurer les services d’une nounou. Mais culturellement, reprendre sa vie professionnelle à plein régime quelques mois après la naissance d’un enfant n’est pas une évidence en Allemagne, et pas seulement pour des raisons d’infrastructures. Consacrer du temps à un nouveau-né est perçu positivement pour le développement de l’enfant. Reprendre le travail rapidement, comme c’est le cas en France, reste suspect. Le mot “Rabenmutter” ou “mère corbeau” n’a pas disparu. La ministre du Logement actuellement enceinte s’est vu reprocher sur les réseaux sociaux sa grossesse alors qu’elle est aux affaires. Mais pour les membres du gouvernement, un congé parental n’est pas prévu. Les ministres doivent reprendre du service au plus tard huit semaines après la naissance de leur enfant.
Un an et demi après la légalisation de l’usage récréatif du cannabis, le premier rapport d’évaluation montre que les changements restent limités. Depuis avril 2024, les adultes peuvent à certaines conditions consommer librement du cannabis et s’en procurer. Des clubs permettant l’approvisionnement légal ont vu le jour.
Mais les effets sur la consommation sont modestes. Les tendances de fond (recul chez les adolescents, augmentation chez les jeunes adultes) se maintiennent. Les dealers ont toujours le vent en poupe. Les clubs créés n’assurent que 0,1% de la consommation. Et les plants que l’on peut avoir chez soi n’ont pas envahi les balcons germaniques. Le seul changement notable en 18 mois est le recul sensible des poursuites puisque fumer un joint est devenu légal. L’évaluation court jusqu’en 2028.
Le ministre-président de la Bavière ne recule devant rien. A nouveau, il a enregistré une chanson -“Sweet Caroline- un hit incontournable de la fête de la bière qui s’achève aujourd’hui. Près de 800 000 personnes le suivent sur Instagram.
https://www.instagram.com/p/DPG3NdYiBXi/
L’émission d’Arte “28 minutes” s’est intéressée à la passion de Markus Söder pour les saucisses : https://www.instagram.com/reel/DOl1T_piPm9/
C’est la nouvelle mode sur les réseaux sociaux : les jeunes se retrouvent (comme hier à Düsseldorf dans l’annonce ci-dessous) pour dans un parc manger ensemble un pudding avec une… fourchette et briser l’isolement social. Et peut-être remettre en cause l’efficience germanique ?