Allemagne, nid d'espions
Russie, Chine : la liste des affaires d'espionnage s'allonge de jour en jour. Les relations sulfureuses de membres du parti d'extrême-droite Alternative pour l'Allemagne AfD avec ces deux régimes autoritaires vont au-delà d'affinités politiques. L'AfD doit affronter un vent mauvais avant les Européennes. Le mouvement va t'il pâtir de ces affaires?
L’Allemagne, poids lourd économique et politique, est dans le collimateur de certains Etats qui cherchent à obtenir des informations sensibles au sein des sphères gouvernementales ou dans les milieux industriels. La désinformation sur les réseaux sociaux pour influencer l’opinion publique fleurit et des cyberattaques malintentionnées ont lieu régulièrement.
Les affaires d’espionnage se sont succédé ces derniers jours. La semaine dernière, un ancien collaborateur des services secrets allemands était jugé pour avoir transmis des informations sensibles à la Russie ce qu’il réfute. Deux Germano-Russes ont été arrêtés la semaine dernière en Bavière. Ces anciens combattants dans l’Est de l’Ukraine au sein des forces séparatistes avaient rassemblé des informations au profit de Moscou et auraient été prêts à se livrer à des actions violentes. Ils avaient effectué des repérages pour planifier des actes de sabotage afin empêcher les livraisons de matériels militaires à l’Ukraine
Mais c’est avant tout l’arrestation d’un collaborateur parlementaire de la tête de liste du parti d’extrême-droite Alternative pour l’Allemagne pour les élections europénnes du 9 juin qui défraie la chronique depuis mardi. Il est accusé d’avoir livré des informations à la Chine dont il est originaire. Son patron, Maximilian Krah, affirme avoir appris dans la presse l’interpellation de son assistant et rejette toute responsabilité. Une déclaration peu crédible en raison des soupçons de longue date qui pesaient sur l’assistant parlementaire. Les voyages organisés par ce dernier en Chine, les prises de position favorables au régime de Pékin (et de Moscou) du député européen Krah permettent de douter de sa surprise affichée.
La tête de liste de l’AfD refuse de se retirer. Cela est de toute façon pratiquement impossible, le matériel électoral officiel comme celui du parti étant déjà imprimé. Mais la direction qui prend ses distances avec son candidat lui a demandé de se faire discret. Maximilian Krah n’assistera pas au lancement samedi de la campagne du parti d’extrême-droite pour les Européennes. Il n’aura pas droit à une vidéo de campagne et l’AfD évitera les affiches avec son effigie. A cette dernière affaire s’ajoute les polémiques autour du numéro deux sur la liste pour les Européennes. Per Bystron (comme Krah) est soupçonné d’avoir reçu de l’argent russe via une plateforme de propagande de ce pays basée à Prague. En décembre dernier, Krah a été interrogé par le FBI à son arrivée aux Etats-Unis à ce sujet.
Le parti d’extrême-droite fait face à un vent mauvais depuis le début de l’année lorsque des révélations sur une réunion discrète à l’automne dernier où le renvoi de millions d’étrangers mais aussi d’Allemands d’origine étrangère a été évoqué. De nombreuses manifestations inédites contre l’AfD ont ensuite eu lieu durant plusieurs semaines dans toute l’Allemagne. Un procès se tient actuellement contre le héraut de l’aile la plus radicale du parti Björn Höcke à qui on reproche d’avoir utilisé un slogan nazi. L’intéressé, un ancien prof d’histoire, nie avoir connu l’origine “Tout pour l’Allemagne” utilisée par les SA, les sections d’assaut nazies. Les juges ont du mal à croire l’intéressé qui pourrait écoper début mai d’une peine de prison avec sursis.
Ces affaires égratignent la crédibilité du parti qui dénonce régulièrement les forces établies et leurs pratiques. Surtout, ces accusations e collusions avec des régimes étrangers autoritaires nuisent à l’image de patriotes purs et durs de l’AfD. Le parti a vu son score légèrement baisser dans les sondages. Quelles conséquences auront ces affaires d’ici le 9 juin? Difficile à dire. L’AfD surfe comme à l’ordinaire sur la stratégie du complot orchestré à son égard. Et une partie de sa base n’a peut-être rien à redire aux liens disons très étroits de certains responsables avec Pékin ou Moscou.
Politique étrangère
-Scholz en Chine : business as usual
La deuxième visite officielle du chancelier dans ce pays depuis son arrivée au pouvoir rappelait un peu les déplacements de l’ère Merkel. Le social-démocrate était accompagné d’une importante délégation économique. La réduction des risques, le “derisking”, prôné notamment par Ursula von der Leyen, pour réduire la dépendance de l’Europe à l’égard de Pékin n’est pas de mise pour Olaf Scholz, depuis peu sur TikTok, la plateforme chinoise. La stratégie Chine élaborée par le gouvernement allemand qui prévoit une distance plus importante à l’égard de la Chine ne fait visiblement pas partie des lectures de chevet du chancelier. Quant à la partie politique de la visite avec la rencontre avec Xi Jinping, les caricaturistes ont ironisé sur le dialogue de sourds et des discussions au bilan bien maigre pour Berlin, notamment en ce qui concerne l’espoir d’une influence de la Chine sur la Russie dans la guerre en Ukraine.
-la diplomatie du Kebab
Cela faisait dix ans qu’un président allemand n’était pas allé en Turquie. Il est vrai que le dialogue entre Berlin et Ankara n’est pas au beau fixe. Pour célébrer le centième anniversaire des relations diplomatiques entre les deux pays, Frank-Walter Steinmeier a voulu mettre l’accent sur ce qui rapproche plutôt que sur les divergences (confer Gaza/Israël) à savoir une communauté importante d’origine turque en Allemagne. Avec un symbole gastronomique.
Un bloc de soixante kilos de viande congelés, une de ces broches kebab massive qu’on trouve dans des petits snacks partout en Allemagne. L’avion présidentiel avait lundi un bagage inhabituel dans sa soute. Sept milliards d’Euros de chiffre d’affaires par an : le kebab est devenu en quelques décennies un plat national allemand. Inflation oblige, son prix a augmenté. Des jeunes ont même demandé au chancelier Scholz une subvention pour rendre le kebab plus abordable.
La famille du Berlinois d’adoption Arif Keles vend des kebabs depuis près de quarante ans. Ce germano-turc fait partie des invités officiels de Frank-Walter Steinmeier et a servi sa spécialité lors d’un diner officiel à Istanbul.
Mais le cadeau de Steinmeier a aussi suscité des critiques cultivant pour certains le cliché sur les Turcs en Allemagne dont les mérites se limiteraient au street food très populaire. A la décharge du chef de l’Etat allemand, ce dernier avait aussi au sein de sa délégation des personnalités connues de la communauté germano-turque : des artistes, le PDG de DHL ou le maire de Hanovre.
-Israël/Gaza : la liberté d’expression en danger ?
Le soutien résolu de l’Allemagne à Israël malgré de timides critiques contre le gouvernement Netanyahu et en faveur d’une aide humanitaire plus résolue pour la population de Gaza nuisent à la réputation de Berlin dans le monde arabe de plus en plus critiquée. On l’a vu également en marge du voyage de Steinmeier en Turquie. Les nombreuses contraintes entourant des manifestations pro-palestiniennes en Allemagne ainsi que des interdictions suscitent des polémiques sur place comme à l’étranger.
La dissolution par les forces de l’ordre d’un congrès palestinien à Berlin à la mi-avril après deux heures a alimenté ces critiques. La police, déployée en force, a coupé le courant lorsqu’est apparu sur un écran le visage de Salma Abou Sitta, un chercheur palestinien de 86 ans interdit de séjour en Allemagne pour avoir salué, en janvier, « le courage des terroristes du Hamas ».
Fallait-il interdire un congrès de trois jours parce qu’une personne posait problème ?Ou encore empêcher l’ancien ministre des Finances grec Yannis Varoufakis de se rendre à Berlin ? Ces décisions sont disproportionnées et nourrissent pour les partisans de la cause palestinienne, mais pas seulement, le sentiment que la liberté d’expression aurait ses limites en Allemagne.
Politique intérieure
-les libéraux affichent la couleur et provoquent un mini-psychodrame
Le FDP a adopté lundi un texte perçu comme un chiffon rouge par ses alliés sociaux-démocrates et écologistes. Ces 12 propositions prônent notamment des sanctions sévères pour les bénéficiaires de l’aile sociale. S’ils refusent une offre d’emploi, leur allocation serait amputée de 30%. Le FDP veut remettre en cause la retraite à 63 ans qui permet à des personnes qui ont cotisé 45 ans de cesser de travailler plus tôt. Les subventions pour les énergies renouvelables devraient être supprimées au profit d’une régulation par le marché.
Déjà, les commentateurs faisaient des parallèles avec 1982, lorsque le même parti libéral avait quitté la coalition avec le SPD d’Helmut Schmidt pour s’allier avec le chrétien-démocrate Helmut Kohl. Mais aujourd’hui, un renversement d’alliance comparable n’est pas jouable au parlement faute de majorité entre CDU/CSU et FPD. Quant à de nouvelles élections, très compliquées juridiquement à organiser en Allemagne, elles pourraient bien déboucher sur une éjection pure et simple des libéraux du Bundestag alors qu’ils atteignent difficilement dans les sondages la barre des 5% nécessaire pour être représenté à la chambre basse.
La gauche a sévèrement critiqué ces propositions. Les chrétiens-démocrates voyaient déjà la fin de la coalition au pouvoir approcher. Il faut avant comprendre ce texte comme un baume au coeur des militants libéraux frustrés quelques jours avant le congrès du parti ce week-end.
-la CDU présente sa campagne pour les Européennes
Il y aura également des municipales dans plusieurs régions allemandes le 9 juin en plus des Européennes. A Potsdam, aux portes de Berlin, Frank Reich est candidat. Avec un nom pareil, le social-démocrate n’a aucune excuse pour ne pas s’engager en faveur des relations franco-allemandes dans cette ville jumelée avec Versailles.
Partenariat commercial avec Peugeot.
Le nouveau E-3008 : la vision de l’électrique durable selon Peugeot
Le Peugeot E-3008, marque l’accélération de Peugeot sur le marché de l’électrique avec en ligne de mire l’ambition de devenir un acteur 100% électrique en Europe à horizon 2030.
Peugeot met l’accent sur la durabilité avec l’utilisation de matériaux verts et une production localisée en France, alignée avec l’objectif d’atteindre le zéro carbone d’ici 2028.
Le E-3008 est le premier modèle à bénéficier de la toute nouvelle plateforme STLA Medium de Stellantis. Conçue pour les futurs véhicules électriques du groupe, elle établit une nouvelle référence sur le marché.
Economie/Société
-l’intégration des réfugiés sur le marché du travail
Elle progresse d’après de nouveaux chiffres. Les deux tiers des migrants arrivés en Allemagne entre 2013 et 2019 disposent d’un emploi. Parmi ces personnes, les trois quarts ont un CDI à temps plein. Elles gagnent en moyenne 2570 Euros par mois.
-Berlin : le retour du billet mensuel à 29 Euros
Le billet mensuel à 49 Euros qui permet d’utliser dans tout le pays les transports en commun et les trains régionaux va bientôt fêter son premier anniversaire. La ville de Berlin resuscite un autre abonnement qui avait été proposé dans la capitale allemande entre octobre 2022 et avril 2023. Ce billet coûte lui 29 Euros par mois et n’est valable que pour Berlin intra muros. Il est en vente depuis cette semaine et pourra être utilisé à partir du premier juillet. Il s’agissait d’une promesse de campagne des sociaux-démocrates (alliés à la CDU) qui va coûter 300 millions à la ville qui pourtant doit se serrer la ceinture. Cette mesure est critiquée. Par certains comme les Verts qui auraient préféré que l’argent soit investi dans les infrastructures au lieu de profiter à tout un chacun, y compris aux plus aisés. La Bavière qui dans le cadre de la péréquation entre les régions finance indirectement la capitale, mal aimée dans le Sud, dénonce un cadeau électoral et une gabegie.
-Cannabis : une libéralisation bien encadrée
Son usage récréatif est autorisé depuis le 1er avril. Si la détention de doses minimes comme la culture de trois plants par personne sont désormais légales, les clubs auxquels il faudra adhérer pour acheter son cannabis ne seront opérationnels qu’au premier juillet. D’ici là, les dealers continuent à se frotter les mains. Le dispositif légal autour de ces associations pourrait être durci pour éviter toute dérive commerciale.
La Deutsche Bahn, elle, veut interdire toute consommation dans ses gares. Cela vaut déjà dans les zones piétonnes et autour des écoles et des installations sportives. Et à l’Oktoberfest de Munich, vous pourrez toujours boire des litres et des litres de bière, mais les joints eux seront proscrits.
-Une journée pour les vétérans de la Bundeswehr
On en parle depuis des années. Le Bundestag doit enfin adopter ce jeudi l’instauration d’une telle journée. Les partis de la coalition au pouvoir (SPD, FDP, Verts) y sont favorables comme les chrétiens-démocrates. Le 15 juin a été retenu. Les modalités de cette journée doivent encore être définies.
-Une convention citoyenne pour tirer le bilan des mesures covid
Le SPD propose que des citoyens se penchent sur les dispositifs législatifs et sanitaires mis en place durant la pandémie. Les verts et les libéraux soutiennent cette proposition.
Culture
-Emmanuel Kant et Caspar David Friedrich à l’honneur
Le philosophe de Königsberg (Kaliningrad) né le 22 avril 1724 aurait eu 300 ans cette année. Ces derniers jours, de nombreux hommages lui ont été rendus. Olaf Scholz a prononcé un discours lundi dans lequel il s’en est pris aux tentatives de Vladimir Poutine d’instrumentaliser le penseur des Lumières. Pour le chancelier, l’attaque du président russe contre l’Ukraine est diamétralement opposée aux valeurs que représentent Kant qui n’a jamais mis les intérêts nationaux en avant mais plaçaient la dignité, l’autonomie et la liberté au coeur de sa pensée.
Autre anniversaire cette année, la naissance il y a 250 ans du peintre iconique du romantisme allemand, Caspar David Friedrich. Plusieurs expositions lui rendent hommage. La dernière en date vient de s’ouvrir à Berlin. https://www.museumsportal-berlin.de/de/ausstellungen/caspar-david-friedrich/
Günther Krabbenhöft, le doyen des hipsters berlinois
Le septuagénaire est une légende vivante dans le monde de la nuit berlinoise et au-délà. Il est temps que vous fassiez sa connaissance. Arte vous dit tout sur lui: https://www.arte.tv/fr/videos/116057-004-A/twist/
